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CHLOE, STEVEN, IGOR, ANTON, quatre histoires parmi tant d’autres...
Le
médiateur est la personne qui interprète pour l'enfant ses expériences en les orientant vers un but. Quand il y a déficience mentale, il y a
blocage du passage de la médiation.
Rétablir cette possibilité de médiation est alors le moyen de stimuler
et de faire évoluer les capacités d'apprentissage.
Selon Reuven Feuerstein, «toute personne est capable de changement, quels que soient son âge, son handicap et la gravité de ce handicap. Les enfants différents ont simplement besoin d'un surcroît d'attention et d'investissement personnel.»
Mais pour qu'un changement se produise, il faut qu'il y
ait médiation humaine. C'est là le deuxième pilier de la pensée du professeur
Feuerstein. Le médiateur est la personne
qui s'interpose entre l'enfant et le monde, qui interprète pour l'enfant ses expériences, qui réordonne, organise,
regroupe, structure les stimuli auxquels l'enfant est exposé, en les orientant
vers un objectif donné. Et c'est cette
médiation qui crée chez l'enfant la disposition à apprendre.
Les critères de
la médiation
Au fil des années,
Reuven Feuerstein et son équipe élaborent les modalités de cette
médiation. Ils définissent trois
critères importants : l'intentionnalité, la transcendance et le sens. La médiation doit d'abord être animée par
l'intention : si, par exemple, j'apprends à un enfant certains mots, ce
peut être dans l'intention de le rendre capable de construire d'autres mots. Cette intention doit toujours rester présente
dans l'esprit du médiateur. La
transcendance, elle, est la volonté de dépasser les besoins immédiats de
l'enfant pour en créer de nouveaux : je peux apprendre à un enfant à
utiliser des couverts pour manger ... niais si, en même temps, je lui apprends
à se laver les mains avant le repas, j'élargis le champ du besoin immédiat à
des comportements qui deviendront des besoins secondaires. Et enfin, l'enfant doit comprendre le sens
des actions du médiateur, quels buts il poursuit et pourquoi. C'est la médiation de la signification.
Trouver le
passage pour la médiation
Selon la théorie
du professeur Feuerstein, c'est la rareté ou le manque de médiation humaine qui
sont à l'origine d'un développement intellectuel insuffisant. C'est une approche totalement nouvelle.
«L'attitude traditionnelle est de dire: un enfant trisomique est retardé parce
qu'il a trois chromosomes au lieu de deux, explique Rafi Feuerstein, fils de
Reuven Feuerstein et vice directeur de l'institut. Nous, nous disons: sa trisomie crée une
situation qui bloque le passage de la médiation - d'où son retard. Notre rôle est de trouver les interstices
dans la muraille et d'y faire pénétrer la médiation, qui entraînera le
changement.
Cette théorie du
changement et de l'apprentissage par médiation a donné naissance à deux
applications pratiques: la méthode d'évaluation dynamique du potentiel
d'apprentissage et le programme d'enrichissement instrumental (PEI). Des outils pédagogiques qui, à travers la
médiation, s'appuient sur une attitude commune : valoriser l'enfant au
maximum en évitant toujours de le mettre en échec.
La méthode Feuerstein a forgé ses propres outils pédagogiques, qui ont transformé la vie de milliers d'enfants. Les deux principaux sont la méthode d'évaluation dynamique du potentiel d'apprentissage - alternative à la rigidité des tests de Q.I. - et le programme d'enrichissement instrumental (PEI), un programme éducatif qui permet l'évolution et le développement des fonctions cognitives.
De nombreux
enfants viennent de tous les pays du monde à l'ICELP pour une évaluation
(environ un millier par an et la liste d'attente se chiffre par
centaines). Les problèmes dont souffrent
ces enfants sont multiples: retard dans le développement, dyslexie, problèmes
sensoriels, émotionnels, troubles du comportement, hyperactivité, épilepsie,
autisme ... Des situations qui toutes entravent la capacité de l'enfant à
apprendre.
« Les tests
traditionnels d'intelligence durent quelques heures,
au terme desquelles
l'enfant est catalogué avec un chiffre (son QI) qui va lui rester attribué
toute sa vie et qui déterminera son orientation. Ici - explique le professeur Steven Gross,
psychologue responsable de la prise en charge des évaluations - une évaluation dure
au minimum dix jours. Y participent des
psychologues, des neurologues, des thérapeutes du langage, Une évaluation se
déroule en trois temps: test, explication, post-test. Nous faisons passer à l'enfant des tests
adaptés à son âge et à son niveau, qui ne s'appuient pas sur des connaissances
préalables.
Nous observons
comment il procède, puis nous lui montrons ce qu'il faut faire pour réussir le
test. Enfin nous mesurons comment il a
assimilé ce que nous lui avons enseigné ... »
Evaluer le
potentiel d'apprentissage
Lors d'un test
traditionnel, l'examinateur n'intervient jamais.
Dans la méthode à
trois temps de Reuven Feuerstein, l'examinateur intervient sans cesse-. il fait
des remarques, demande et donne des explications, fait répéter des opérations,
interprète les résultats, anticipe les difficultés, suscitant ainsi chez
l'enfant une intense activité de réflexion.
Il est son médiateur cognitif.
«Le médiateur
observe les fonctions cognitives de l'enfant et ses modes de conduite, poursuit
Steven Gross. Il se concentre avant tout
sur ce que l'enfant peut faire et non - comme cela arrive trop souvent ailleurs
- sur ce qu'il ne peut pas faire. Un
enfant n'est pas comparé à une norme mais à lui-même, le but de l'évaluation
n'étant pas de déterminer son niveau par rapport à une population mais de
comprendre comment il apprend et comment il réfléchit.
Dans une mer -
parfois un océan ! - de symptômes, on cherche des îlots de normalité. Qu'est-ce qui fait sourire un enfant ? Qu'est-ce qui le motive ? Qu'est-ce qu'il
réussit à faire ?
Une fois ces îlots
repérés, il faut les élargir, les consolider et les relier.»
Le professeur
Feuerstein a élaboré, dès les années cinquante, un programme appelé «programme
d'enrichissement instrumental» «Enrichissement», parce qu'en inculquant des
stratégies d'apprentissage et de pensée ce programme enrichit l'esprit.
«Instrumental», parce qu'il s'agit d'une série d'instruments - 14
cahiers d'exercices - destinés à susciter et à aiguiser des pré-requis
cognitifs qui font défaut à l'enfant ou à l'adulte.
Chaque cahier
d'exercices est conçu de façon à remédier à un dysfonctionnement cognitif
spécifique. Par exemple: une vision
fragmentée de la réalité (l'enfant n'arrive pas à établir des corrélations
entre les choses), une incapacité à faire des comparaisons, une impulsivité qui
empêche l'enfant de réfléchir, un manque d'organisation, une orientation spatiale
déficiente, une mauvaise appréhension du temps, etc...
Comme dans la méthode d'évaluation dynamique, l'interaction entre l'élève et le médiateur est primordiale. C'est elle qui induit le changement. Un enseignant explique, identifie et formule les difficultés de l'enfant, l'approuve et l'encourage pour l'aider à surmonter ses dysfonctionnements..
Enrichir
l'esprit
Une expérience et
la recherche ont montré que l'utilisation du PEI - appliqué trois à cinq heures
par semaine pendant deux ans a apporté des changements majeurs et durables
dans les habitudes d'apprentissage et les schémas de pensée de ceux qui ont
suivi ce programme. Depuis sa création,
il est régulièrement revu et amélioré.
Conçu initialement pour les enfants en difficulté, le PEI est aujourd'hui
enseigné à de nombreux adultes, dans l'armée, dans l'industrie (formation,
réorientation, réinsertion). Il
s'adresse à toute personne désireuse de développer son fonctionnement cognitif.
LE PROGRAMME D’ENRICHISSEMENT INSTRUMENTAL DE BASE
Ce nouveau programme permet de développer les capacités d’adaptation, de prévenir les difficultés d’apprentissage et de remédier aux dysfonctionnements intellectuels de tout enfant à partir de 3 ans, même s’il ne parle pas.
On ne peut pas construire une maison sans fondations solides ! De même pour pouvoir apprendre et raisonner, on a besoin de fondations, ce qu’on appelle les fonctions cognitives. Elles ne sont pas bien installées ou sont déficientes chez les enfants autistes, trisomiques ou qui ont des difficultés d’ordre intellectuel. Cette méthode permet de combler ce manque tout en apportant certaines connaissances de base. Elle favorise une motivation interne et la réflexion sur soi avec des éléments d’intelligence émotionnelle. L’enfant apprend aussi à être actif vis à vis de toute information.
Si le programme de l'équipe Feuerstein se focalisait précédemment sur les populations scolaires de plus de 8-9 ans, il était devenu nécessaire de pouvoir s'adresser à de plus jeunes enfants et aux personnes qui, en raison de leur bas niveau de fonctionnement, ne pouvaient pas tirer profit des anciens programmes. Pour ces enfants d'âge préscolaire ou plus âgés mais d'un niveau de fonctionnement plus bas, l'équipe a dû préparer des évaluations et des instruments d'enrichissement qui correspondrait à un niveau de prélecture et qui tiendrait compte du peu de connaissances et d'expériences que cette population a de son environnement. Les séances de ce programme devaient aussi pouvoir doter l'enfant de connaissances de base. En effet, sans un minimum de savoir, on ne peut pas faire d'opérations mentales. Le Programme d’Enrichissement Instrumental de Base est alors né et répond à toutes ces attentes.
Les objectifs de ce programme sont :
2. La prévention - Pourquoi attendre que l'enfant ait des problèmes ? Certains enfants présentent des risques de difficultés d'apprentissage dus à des facteurs endogènes ou exogènes qui peuvent être aggravés par un manque d'une médiation appropriée ou par une privation culturelle. Ce manque peut être dû à leur condition neurophysiologique ou à une insuffisance de disponibilité de leur environnement. Pourquoi ne pas lui donner des outils pour prévenir les problèmes ?
3. La remédiation - Il s'agit de remédier à des dysfonctionnements spécifiques, là où le développement a été entravé par les divers facteurs de risque. La remédiation est dirigée vers les secteurs d'apprentissage en retard en modulant l'intensité et avec des modalités spécifiques. Le PEI de base sert aussi à de jeunes adultes très en retard.
Le PEI de BASE se compose actuellement d’une série de 10 instruments pour la plupart non verbaux pouvant être utilisés avec de jeunes enfants (à partir de 3 ans) ou des enfants ayant un bas niveau de performance.
CHLOE,
STEVEN, IGOR, ANTON, quatre histoires parmi tant d’autres...
Les enfants
confiés à l'Institut Feuerstein souffrent de handicaps différents.
Quelles
que soient la diversité et les causes de leurs troubles, le succès de leur
prise en charge démontre l'universalité et l'efficacité de la méthode
d'enrichissement instrumental et de l'intense médiation dont ils bénéficient.
Chloé : comment apprendre à voir le monde quand on est aveugle…
Chloé, 6 ans, est aveugle de naissance. Une version du Programme d'enrichissement instrumental, adaptée pour les malvoyants par le Pr. Gouzman, lui a permis d'améliorer sa perception du monde et d'en construire des représentations proches de celles des enfants voyants. Elle a donc pu être intégrée dans une école normale, qu'elle continue à suivre actuellement.
Steven :
comment s’ouvrir aux autres quand on s’est enfermé dans son monde…
Steven, 8 ans, est
arrivé à l'Institut avec un diagnostic d'autisme sévère : enfermé dans sa
«forteresse vide», il ne parlait pas, évitait les regards et refusait toute
forme de communication. Son programme
d'enrichissement instrumental comporte plus de 20 heures par semaine de thérapie
du langage. Cette intensité a permis de
forcer peu à peu ses barrières et d'engager des débuts d'échanges.
Igor : comment
passer d’une culture à l’autre sans se perdre…
Igor est un jeune
émigrant russe, arrivé en Israël à 9 ans.
Très agité, après deux ans d'échec scolaire, il a été pris en charge à
l'institut. Les examens pratiqués ont
mis en évidence de gros problèmes d'organisation spatiale. lis ont pu être
stabilisés en une année, ce qui lui a permis de passer enfin dans une classe
supérieure ou il obtient de bons résultats.
Anton :
comment retrouver le chemin du savoir…
Anton a maintenant
24 ans. A 20 ans, il est déjà pilote
après de brillantes études lorsqu'un grave accident lui cause une lésion
cérébrale irréversible. Il perd tous ses
moyens et devient incapable de contrôler ses actions et ses émotions. Quand il arrive à l'institut 2 ans après son
accident, il est aphasique, ne sait plus ni lire ni écrire et ne possède qu'un
vocabulaire d'une dizaine de mois. Il
s'agit cette fois d'utiliser le Programme d'enrichissement instrumental pour
reconstruire. Après une année de travail
intense avec des thérapeutes du langage et différents médiateurs, il a récupéré
tous ses moyens d'expression et repris ses études universitaires.
Ses collègues l'appellent «le Professeur». Il est aussi considéré
comme «celui qui transforme». Il aime à dire : « les chromosomes ne
doivent pas avoir le dernier mot ».
Depuis plus de quarante ans, le professeur Reuven Feuerstein anime et
inspire ceux qui le côtoient, par la force de sa pensée, par son optimisme et
par son dévouement. |
|
Né en Roumanie, Reuven Feuerstein y commence ses
études. En 1944, il émigre en Israël
où il travaille pour l'organisation «Aliayat Ha'noar». De l950 à 1955, il reprend ses études à
l'université de Genève, sous la direction de Jean Piaget et d'André Rey. En 1965 il fonde, avec le Dr Krasilowsky et
Mr Tuchman, l'unité de recherche qui devient l'Institut Hadassah-Wizo-Canada,
à Jérusalem. En 1970, il obtient son
doctorat en psychologie du développement à |
Professeur
Feuerstein, tout votre travail et celui de votre équipe repose sur une croyance en la possibilité
qu'a tout individu de changer, quel que soit son handicap. D'où
vous vient cette certitude ?
Que n'importe quel
être humain puisse changer - pour le bien ou pour le mal car les deux
possibilités existent - est pour nous un postulat de départ. Et il est vrai qu'un postulat est plus près
d'une croyance que d'une preuve scientifique.
Cette croyance en la « modifiabilité» de l'être humain est
fondamentale car elle génère le besoin de changer. Je m'explique. Si votre enfant souffre d'un retard de
développement plus ou moins grave, et que vous ne croyez pas que l'on puisse y
remédier, vous ne ressentirez pas le besoin d'un changement et vous ne ferez
rien pour qu'un tel changement ait lieu.
Si par contre vous y croyez, votre besoin de voir votre enfant changer,
se développer, progresser va vous pousser à agir dans ce sens. La croyance est en quelque sorte la force
énergétique qui nous fait entreprendre tout ce qui est en notre pouvoir pour amener le changement ressenti comme un besoin.
De plus, cette
croyance crée chez moi une responsabilité envers mon prochain. Car s'il est vrai que nous pouvons modifier
l'être humain pour le bien, cela devient un droit pour cette personne d'être
modifiée et notre devoir de faire en sorte qu'elle se modifie. Notre approche, qui dit que I'être humain est
modifiable, nous rend responsable de la qualité de vie de cet être humain.
Vous niez donc
le déterminisme biologique?
Non. Nous disons que I'être humain a une double
ontogénie.
L'ontogénie
biologique: il est un ensemble de cellules qui interagissent entre elles et
avec l'environnement, et l'ontogénie socioculturelle: il est formé par le
milieu avec lequel il interagit. Et
cette ontogénie socio-culturelle peut modifier, beaucoup plus souvent qu'on ne
le pense, le déterminisme biologique.
Nous en avons d'ailleurs des preuves, qui nous viennent des
neurosciences. Celles-ci démontrent en
effet que les conditions neurologiques de l'être humain peuvent être
transformées de manière radicale.
Est-ce la
raison pour laquelle vous vous opposez aux diagnostics précoces ?
Je m'élève contre
les diagnostics précoces lorsqu'ils enferment l'enfant dans une catégorie à
laquelle il lui sera par la suite difficile d'échapper et lorsqu'ils empêchent
toute action susceptible de modifier ce diagnostic. Cet enfant ne parle pas ? Mais que
voulez-vous ? Vous savez bien qu'il ne peut pas parler puisqu'il est ceci, cela
ou autre chose ! Cette prédiction est dangereuse car elle est déjà tout un
programme de « non-faire », si je puis dire.
On renonce d'avance à toute stimulation - physique et intellectuelle -
qui pourrait produire un changement.
C'est contre ce pessimisme que nous luttons. Ces enfants, à qui l'on prédit qu'ils
resteront des «idiots» toute leur vie, sentent bien dans leur expérience intime
qu'ils peuvent faire beaucoup plus que ce qu'on leur permet de faire. J'ai vu des enfants hospitalisés qui
entraient dans des états presque psychotiques simplement parce qu'ils se
révoltaient contre les stéréotypes qu'on leur attribuait. C'est ce que j'appelle le «syndrome du roi
Salomon et du cordonnier». Non, je ne
suis pas le cordonnier que vous imaginez, essaient-ils de nous dire. Je suis Salomon et je peux accomplir une
multitude de choses
S’il est vrai que nous pouvons modifier l’être humain pour le bien, cela devient un droit pour cette personne d’être modifiée et notre devoir de faire en sorte qu’elle se modifie.
Le concept de
médiation est central dans votre pensée, puisque c'est la médiation qui induit le changement. On
pourrait vous dire que vous n'avez rien inventé et que les médiateurs
existent depuis qu'existent de bons enseignants ...
La médiation n'est
rien d'autre qu'une qualité d'interaction entre le médiateur et la personne -
enfant ou adulte - avec laquelle il travaille.
L'enseignant a des informations à transmettre, c'est sa mission principale. Le médiateur, lui, est moins soucieux du
contenu que de la démarche grâce à laquelle il va rendre l'enfant perméable aux
expériences, et l'engager dans un processus où il sera capable d'apprendre et
de comprendre. Cette interaction pour
qu'elle soit de qualité et puisse produire des changements - doit répondre à
des critères bien précis, en particulier ce que nous définissons comme
l'intentionnalité, la transcendance et la signification. La médiation est finalement ce qui rend
l'homme humain. A travers elle, nous
recevons nos modalités de vie, de pensée et d'apprentissage.
La médiation est finalement ce qui rend l’homme humain. A
travers elle, nous recevons nos modalités de vie, de pensée et d’apprentissage.
On a tendance à
penser que le développement psychologique
de l'enfant conditionne ses performances dans le domaine cognitif. Il semble que vous teniez le raisonnement
inverse, à savoir que le bien-être de l'enfant dépend de ses capacités à
réaliser son potentiel cognitif. Ici,
je suis les traces de mon grand maître Piaget.
Selon lui, tout acte physique ou mental contient à sa base les deux
éléments, cognitif et émotionnel. Nous
croyons en effet que le facteur cognitif est en quelque sorte le magma, la
force qui sous-tend la matière. Nous ne
négligeons absolument pas les aspects émotionnels. Au contraire.
Nous créons les conditions qui permettront de générer de nouveaux
sentiments. L'enfant arrivera beaucoup
mieux à comprendre, contrôler, affiner ses sentiments s'il peut raisonner et
utiliser ses capacités cognitives de façon optimale.
Les détracteurs
de votre méthode soutiennent que l'investissement en argent, en temps et en personnel par
enfant est trop élevé...
Les résultats
obtenus ne sont directement mesurables ni par le coût ni par le nombre d'heures
passées auprès de l'enfant, ni par le nombre de professionnels impliqués. Si vous faites d'un enfant qui au départ, ne
peut pas communiquer un être capable de s'intégrer dans la société, comment
évaluer le rendement de cet investissement ? La question du coût et des
résultats est une question de valeur qui doit être discutée en tenant compte de
ce qu'il adviendrait si cet investissement n'avait pas été fait.
Quel est le
coût pour la société de la prise en charge pendant toute sa vie d'un individu pour lequel rien n'aurait été fait ?
Nous ne pouvons
pas offrir nos services directement à de grandes masses de population. Ce que nous voulons, c'est développer et
répandre nos propres modèles de traitement, assez convaincants pour être
réutilisés ailleurs et par d'autres professionnels. Nous avons abondamment démontré que les
enfants déficients peuvent être intégrés dans les écoles. Notre travail sur la réhabilitation cognitive
des personnes atteint au cerveau est à l'origine de tout un programme mené
actuellement aux Etats-Unis et auquel nous sommes associés.
Comment
voyez-vous l'avenir de l'Institut Feuerstein ?
Ce n'est pas pour
moi un sujet de préoccupation. Notre
méthode fait ses preuves. Son efficacité
est maintenant reconnue dans le monde entier, La théorie de la modifiabilité
cognitive a permis d'agir sur une population qui était abandonnée ou négligée
par la médecine et la société. L’équipe
actuellement en place est formée de mon fils, vice président de l'ICELP, et de
professionnels éminents, dont les compétences sont reconnues
internationalement. Ils sont tous parfaitement aptes à poursuivre sans moi tous
nos travaux, aussi bien dans l'application que dans la recherche. Et j'ai aussi toute confiance en cette équipe
et en mon fils Raphaël pour maintenir l'esprit qui est au cœur de notre mission.
L ‘association J’AVANCE remercie Claude Bassou pour l’édition de
la brochure d’où est tiré ce texte.
Un livre riche en émotions à lire pour mieux comprendre le
travail de l'institut Feuerstein : LE VOYAGE D'ANTON aux Presses de